LA CROIX - à Dacca (Bangladesh) , le 29/11/2017 à 17h38
Mis à jour le 30/11/2017 à 9h20
Au Bangladesh, les chrétiens de Dacca attendent avec confiance la venue du pape, qui arrive jeudi 30 novembre à 10 heures (heure de Paris). Extrêmement minoritaires, ils pratiquent leur foi sans contraintes et, pour l’instant, sans peur.
Des religieuses et chrétiens
Bangladais, à la sortie de la messe à Dacca, mercredi 29 novembre. Le pape François y est attendu le 30 novembre 2017.
Chaque dimanche, à Dacca, les membres, chrétiens ou non, des équipes de Vision du Monde Bangladesh se retrouvent à une « dévotion matinale », histoire de bien commencer la semaine de travail. Dans ce pays à forte majorité musulmane, ce sont les vendredis et samedis qui sont jours chômés. Ce dimanche-là, ils sont une soixantaine de cette ONG du réseau World Vision, spécialisée dans le parrainage d’enfants, à être présents.
Cette « dévotion » commence par des psaumes chantés en bengali et en anglais, puis des intentions de prière, et une vidéo pédagogique sur les objectifs du développement durable. « Notre action est concentrée sur les enfants. L’état dans lequel nous laisserons la planète est un sujet essentiel pour cette nouvelle génération. Comme le disait Jean-Paul II, “nous ne pouvons dire que nous aimons cette planète et continuer à la détruire” », explique Boniface Rozario, de Vision du Monde.
Pays à majorité musulmane
Son nom de famille est l’un des nombreux à consonance portugaise qui signent une appartenance à la communauté catholique bangladaise. « Gomes, Costa, Rozario, Souza sont des noms de familles chrétiennes au Bangladesh. Elles ont pris les noms des missionnaires portugais qui les ont convertis au XVIIe siècle », explique Suborno Chisin, autre catholique travaillant à Vision du Monde. Son patronyme à lui indique son lien avec la tribu garo, présente au Nord, à la frontière avec l’Inde. « Des missionnaires américains ont converti au XIXe siècle des tribus animistes, comme les garos. » Ils n’ont pas essayé avec les musulmans.
Aujourd’hui, l’ONG Vision du Monde, d’inspiration chrétienne, ne se hasarde pas non plus à faire du prosélytisme dans ce pays majoritairement musulman. « Le Christ nous apprend à aimer les gens sans distinction de sexe, de caste ou de religion. Mais, jamais, nous ne nous hasarderions à tenter de convertir », explique Juliette, une jeune Bangladaise, protestante de l’Oxford Church, salariée de Vision du Monde.
« La visite du pape va accroître notre visibilité »
Suborno et Boniface ont reçu des badges dans leurs paroisses respectives pour assister avec leur famille à la messe que le pape célébrera vendredi 1er décembre au matin dans le parc Suhrawardy Udyan. Les mesures de sécurité ont été renforcées, mais beaucoup des 380 000 catholiques bangladais seront présents à Dacca. « Nous sommes une minorité minuscule dans notre pays. Nous ne représentons même pas 0,5 % de la population, même si nous détenons des écoles réputées et fréquentées par tous. La visite du pape va accroître notre visibilité, constate Suborno avec satisfaction. Le gouvernement se rappellera qu’il y a aussi des chrétiens dans notre pays. » Juliette est sur la même ligne : « Il va nous aider à être plus visibles. »
La peur n’est pas le quotidien de ces chrétiens qui peuvent exercer leur foi sans contraintes dans leurs églises. « Ceci dit, l’an dernier, un épicier catholique a été tué, sans aucune raison », rapporte Juliette. Boniface résume : « Nous vivons paisiblement avec les musulmans. Nous n’observons pas de danger particulier dirigé spécifiquement contre nous par les fondamentalistes. Pour l’instant. »
La religion catholique en « bonne santé »
Cependant, Juliette a observé quelques changements : « Depuis deux à trois ans, des amies musulmanes se voilent plus qu’avant. Elles savent bien que nous, les chrétiennes, sommes plus libres qu’elles. À l’université, où nous étions une soixantaine de chrétiennes, nous pouvions sortir, assister à des spectacles, ce qu’elles ne pouvaient pas faire. »
Les catholiques bangladais partagent leur foi dans des églises vivantes. Les séminaires sont pleins, l’archevêque de Dacca a été créé cardinal l’an dernier, une première dans l’histoire du jeune pays. « Nous sommes en bonne santé », résume Boniface. L’accueil des Rohingyas a également montré l’action des ONG chrétiennes.
Vision du Monde et Caritas Bangladesh sont présents dans les camps pour apporter réconfort et vivres. Le cardinal D’Rozario a passé récemment deux jours dans ces camps, s’entretenant avec des familles rohingyas. « Ce sont des êtres humains qui souffrent et nous devons répondre à leur appel. » Il s’est dit « heureux que le Bangladesh ait ouvert son cœur pour les recevoir ».
Pierre Cochez, à Dacca (Bangladesh)
ROME, 8 mai 2013 (Zenit.org) - En leur disant chaleureusement sa gratitude, le pape François rappelle aux personnes consacrées, et pas seulement aux femmes, trois exigences de leur vocation: le caractère central du Christ, l'autorité comme service, et le "sentir" dans et avec l'Eglise.
Le pape a en effet reçu ce mercredi matin en audience au Vatican les membres de l'Union internationale des supérieures générales (UISG) réunies à Rome autour du thème du "service de l'autorité selon l'Evangile".
Le pape a ainsi offert son premier enseignement depuis son élection, sur la "vie consacrée": il emploie cette expression englobante de toutes les formes juridiques. Il le fait en tant que successeur de Pierre, mais on perçoit qu'il le fait aussi en tant que religieux, qui sait concrètement de quoi il parle parce qu'il le vit. C'est un pape qui a choisi dans sa jeunesse la vie religieuse, avec ses trois voeux - et même le quatrième voeu des Jésuites -, qui correspondent aux trois "conseils évangéliques" qui caractérisent toute vie consacrée au Christ: chasteté, pauvreté et obéissance.
Plusieurs expressions sont particulièrement frappantes: la consécration suppose un "exode" une sortie de soi, de se "dépouiller" de ses projets; la vie consacrée est "un chemin d'adoration et de service"; l'autorité c'est servir, antidote à "l'arrivisme": "Pensons au tort que font au Peuple de Dieu les hommes et les femmes d'Eglise qui sont carriéristes, arrivistes, qui "utilisent" le peuple, l'Eglise, leurs frères et soeurs - ceux qu'ils devraient servir -, comme un tremplin pour leurs propres intérêts et leurs ambitions personnelles. Mais ceux-là font grand mal à l'Eglise"; "une chasteté "féconde", une chasteté qui enfante des enfants spirituels dans l'Eglise" ; aller aux "périphéries existentielles du coeur humain"; on n'évangélise pas tout seul mais dans et avec l'Eglise, avec l'amour de "notre Sainte Mère l'Eglise hiérarchique", une expression typique de saint Ignace de Loyola.
Surtout, le pape appelle les consacrés à la "joie de la fécondité spirituelle", à la joie "parce que c'est beau de suivre Jésus".
Discours du pape François
Monsieur le Cardinal, vénéré et cher frère dans l'épiscopat, chères soeurs!
Je suis content de vous rencontrer aujourd'hui et je désire saluer chacune de vous, en vous remerciant de ce que vous faites pour que la vie consacrée soit toujours une lumière sur le chemin de l'Eglise. Chères soeurs, avant tout, je remercie mon cher frère le cardinal João Braz de Aviz, pour les paroles qu'il m'a adressées, et je suis content aussi de la présence du secrétaire de la congrégation. Le thème de votre congrès m'apparaît particulièrement important pour la tâche qui vous est confiée: "Le service de l'autorité selon l'Evangile". A la lumière de cette expression, je voudrais vous proposer trois pensées simples, que je laisse à votre approfondissement personnel et communautaire.
1. Jésus, lors de la Dernière Cène, s'adresse aux apôtres par ces paroles: "Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais c'est moi qui vous ai choisis" (Jn 15, 16), qui rappellent à tous, pas seulement aux prêtres, que la vocation est toujours une initiative de Dieu. C'est le Christ qui nous a appelées à le suivre dans la vie consacrée et cela signifie accomplir continuellement un "exode" de vous-mêmes pour centrer votre existence sur le Christ et sur l'Evangile, sur la volonté de Dieu en vous dépouillant de vos projets, pour pouvoir dire avec saint Paul : "Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi" (Ga 2, 20).
Cet "exode" de soi-même, c'est se mettre sur un chemin d'adoration et de service. Un exode qui nous conduit à un chemin d'adoration du Seigneur et de service de Lui dans nos frères et soeurs. Adorer et servir: deux attitudes que l'on ne peut pas séparer, mais qui doivent aller toujours ensemble. Adorer le Seigneur et servir les autres, en ne gardant rien pour soi: voilà le "dépouillement" de qui exerce l'autorité.
Vivez et rappelez toujours le caractère central du Christ, l'identité évangélique de la vie consacrée. Aidez vos communautés à vivre "l'exode" de soi sur un chemin d'adoration et de service, avant tout à travers les trois pivots de votre existence.
L'obéissance, en tant qu'écoute de la volonté de Dieu, dans la motion intérieure de l'Esprit Saint, authentifiée par l'Eglise, en acceptant que l'obéissance passe aussi par les médiations humaines. Souvenez-vous que le rapport autorité-obéissance se situe dans le contexte plus ample du mystère de l'Eglise et qu'elle en constitue une mise en oeuvre particulière dans sa fonction médiatrice (cf. Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique, Le service de l'autorité et l'obéissance, 12)
La pauvreté en tant que dépassement de tout égoïsme dans la logique de l'Evangile, qui enseigne à avoir confiance dans la Providence de Dieu. Pauvreté comme indication à toute l'Eglise que ce n'est pas nous qui construisons le Royaume de Dieu, que ce ne sont pas les moyens humains qui le font grandir, mais c'est avant tout la puissance, la grâce du Seigneur, qui agit à travers notre faiblesse. "Ma grâce te suffit, ma puissance se déploie en effet dans la faiblesse", affirme l'Apôtre des nations (2 Co 12, 9).
Pauvreté qui enseigne la solidarité, le partage et la charité, et qui s'exprime aussi dans la sobriété et la joie de l'essentiel, pour mettre en garde contre les idoles matérielles qui obscurcissent le sens authentique de la vie. Pauvreté que l'on apprend avec les humbles, les pauvres, les malades, et tous ceux qui sont dans les périphéries existentielles de la vie. La pauvreté théorique ne sert à rien. La pauvreté s'apprend en touchant la chair du Christ pauvre, dans les humbles, dans les malades, dans les enfants.
Et puis la chasteté comme un charisme précieux, qui élargit la liberté du don à Dieu et aux autres, avec la tendresse, la miséricorde, la proximité du Christ. La chasteté pour le Royaume des Cieux montre comment l'affectivité se situe dans une liberté mûre et devient un signe du monde à venir pour toujours faire resplendir le primat de Dieu.
Mais s'il vous plaît, une chasteté "féconde", une chasteté qui enfante des enfants spirituels dans l'Eglise. La consacrée est mère, elle doit être mère et non une "vieille fille"! Excusez-moi si je parle ainsi, mais cette maternité de la vie consacrée est importante, cette fécondité! Que cette joie de la fécondité spirituelle anime votre existence; soyez des mères, comme des figures de Marie Mère et de l'Eglise Mère. On ne peut pas comprendre Marie sans sa maternité, on ne peut comprendre l'Eglise sans sa maternité et vous êtes une icône de Marie, de l'Eglise.
2. Le deuxième élément que je voudrais souligner dans l'exercice de l'autorité, c'est le service: nous ne devons jamais oublier que le vrai pouvoir, à quelque niveau que ce soit, est le service, qui a son sommet lumineux sur la Croix. Benoît XVI, avec une grande sagesse, a rappelé plusieurs fois à l'Eglise que si, souvent, pour l'homme, l'autorité est synonyme de possession, de domination, de succès, pour Dieu, l'autorité est toujours synonyme de service, d'humilité, d'amour; cela veut dire entrer dans la logique de Jésus qui se penche pour laver les pieds des apôtres (cf. Angélus, 29 janvier 2012) et qui dit à ses disciples: "Vous savez que les gouvernants des nations exercent sur elles leur domination… Il n'en sera pas ainsi parmi vous - c'est justement le thème de votre congrès, non? "Parmi vous, il n'en sera pas ainsi" - mais qui veut être grand parmi vous sera votre serviteur, et qui veut être le premier sera votre esclave" (Mt 20,25-27). Pensons au tort que font au Peuple de Dieu les hommes et les femmes d'Eglise qui sont carriéristes, arrivistes, qui "utilisent" le peuple, l'Eglise, leurs frères et soeurs - ceux qu'ils devraient servir -, comme un tremplin pour leurs propres intérêts et leurs ambitions personnelles.
Mais ceux-là font un grand tort à l'Eglise.
Sachez toujours exercer l'autorité en accompagnant, en comprenant, en aidant, en aimant; en embrassant tous et toutes, spécialement les personnes qui se sentent seules, exclues, arides, les périphéries existentielles du cœur humain. Gardons le regard fixé sur la Croix: c'est là que se situe toute autorité dans l'Eglise, là où Celui qui est le Seigneur se fait serviteur jusqu'au don total de lui-même.
3. Enfin, l'ecclésialité comme l'une des dimensions constitutives de la vie consacrée, dimension qui doit être constamment reprise et approfondie au cours de la vie. Votre vocation est un charisme fondamental pour le chemin de l'Eglise, et il n'est pas possible qu'une consacrée ou un consacré ne "sente" pas avec l'Eglise. Un "sentir" avec l'Eglise qui nous a enfantés dans le baptême; un "sentir" avec l'Eglise qui trouve son expression filiale dans la fidélité au Magistère, dans la communion avec les Pasteurs et avec le Successeur de Pierre, évêque de Rome, signe visible de l'unité. L'annonce et le témoignage de l'Evangile ne sont jamais - et pour tout chrétien - un acte isolé. C'est important: pour tout chrétien, l'annonce et le témoignage de l'Evangile n'est jamais un acte isolé, ou celui d'un groupe, ni, comme le rappelait bien Paul VI, d'aucun évangélisateur, "en vertu d'une inspiration personnelle, mais en union avec la mission de l'Eglise et en son nom" (Exhort. ap. Evangelii nuntiandi, 80). Et Paul VI continuait: "C'est une dichotomie absurde que de penser vivre avec Jésus sans l'Eglise, de suivre Jésus en dehors de l'Eglise, d'aimer Jésus sans aimer l'Eglise" (cf. ibid., 16).
Sentez la responsabilité que vous avez de vous occuper de la formation de vos Instituts dans la saine doctrine de l'Eglise, dans l'amour de l'Eglise, dans l'esprit ecclésial.
En somme, le caractère central du Christ et de son Evangile, l'autorité comme service d'amour, "sentir" dans et avec l'Eglise Mère: trois indications que je désire vous laisser en y ajoutant une fois encore ma gratitude pour votre travail qui n'est pas toujours facile. Qu'est-ce que l'Eglise serait sans vous? Il lui manquerait la maternité, l'affection, la tendresse! Intuition de mère.
Chères sœurs, soyez certaines que je vous suis avec affection. Je prie pour vous, mais vous aussi priez pour moi. Saluez vos communautés de ma part, surtout les sœurs malades et les jeunes. A toutes va mon encouragement à suivre avec parresia (audace, notamment dans saint Paul, ndlr) et avec joie l'Evangile du Christ. Soyez joyeuses, parce que c'est beau de suivre Jésus, c'est beau de devenir une icône vivante de la Madone, et de notre Sainte Mère l'Eglise hiérarchique. Merci.